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Épargne : les Français misent sur la prudence… et sur leur retraite

L’édition 2025 du baromètre Ifop pour Altaprofits confirme une tendance forte : les Français continuent à épargner régulièrement, mais restent frileux face au risque. Le Plan Épargne Retraite progresse, les écarts entre hommes et femmes persistent, et les dynamiques régionales révèlent un pays encore divisé sur sa culture financière.
 

Une épargne régulière, mais très défensive
L’image d’un Français prévoyant se confirme encore cette année : 83 % déclarent épargner régulièrement, un chiffre stable malgré les tensions inflationnistes et géopolitiques. Mais cette épargne reste majoritairement prudente : 73 % privilégient les placements sans risque, comme le Livret A ou les fonds en euros. Seuls 4 % des sondés acceptent un niveau de risque élevé pour espérer de meilleurs rendements.
 

Ce comportement s’explique par une méfiance persistante envers les marchés financiers, nourrie par la volatilité post-Covid, les conflits internationaux et les incertitudes monétaires. Le souvenir de la crise de 2008 est encore présent, et les épargnants préfèrent la liquidité immédiate à une performance future incertaine.
 

« Il existe un vrai besoin de pédagogie financière, surtout dans les classes moyennes et chez les jeunes actifs », analyse Raphaël Leclercq, directeur général d’Altaprofits. Le risque n’est pas seulement économique, il est aussi culturel. En France, contrairement aux États-Unis, la sécurité du capital est souvent perçue comme prioritaire sur la croissance à long terme.
 

Le Plan Épargne Retraite poursuit son ascension
L’un des faits marquants du baromètre 2025 est la progression continue du Plan Épargne Retraite (PER). Désormais, 19 % des sondés y ont souscrit, contre 14 % un an plus tôt. Parmi les actifs, 53 % se disent intéressés par ce dispositif qui permet de déduire les versements de son revenu imposable tout en préparant l’avenir.
 

Le succès du PER repose sur deux ressorts :
– une carotte fiscale immédiate, bienvenue en période de pression budgétaire,
– et une prise de conscience croissante de la fragilité du système par répartition.
En effet, seuls 28 % des Français disent encore faire confiance au système de retraite public, un chiffre en chute libre (-11 pts sur un an). La réforme de 2023 et l’instabilité politique qui l’a suivie ont ancré l’idée qu’il faut prendre en main sa retraite, comme on prendrait en main un bien immobilier.
 

Le PER s’impose donc peu à peu comme une nouvelle norme patrimoniale, notamment pour les indépendants, les professions libérales, et les cadres fortement imposés. Son développement constitue un virage stratégique pour l’assurance-vie, qui doit désormais composer avec ce concurrent plus fléché et plus lisible.
 

Femmes, régions, âges : des lignes de fracture persistantes
Le baromètre met aussi en lumière des écarts structurels dans les comportements d’épargne. Les femmes restent plus prudentes : 76 % privilégient les placements garantis, contre 70 % des hommes. Une différence qui tient à la fois à une moindre exposition historique aux produits financiers risqués et à une culture du risque différente, que les acteurs de la gestion patrimoniale cherchent à corriger.
 

Les régions présentent elles aussi des contrastes saisissants. L’Île-de-France se distingue par une part plus élevée d’investisseurs en assurance vie, SCPI ou marchés financiers. À l’inverse, la Normandie, le Centre-Val de Loire ou la Nouvelle-Aquitaine restent attachées aux produits d’épargne réglementée. L’effet pouvoir d’achat, combiné au poids des conseillers traditionnels, explique en partie ces écarts.
 

Enfin, le comportement des jeunes évolue : les moins de 35 ans sont plus nombreux à vouloir épargner « pour acheter un bien immobilier », tandis que les plus de 50 ans visent avant tout la transmission ou la retraite. Deux logiques différentes qui cohabitent dans un paysage patrimonial en mutation.